mercredi 11 novembre 2015

Des effets pervers des réseaux sur la discussion

Propos empruntés à Abraham Maslow ("Être humain", p.80 – Eyrolles).

« Il me semble remarquable que des êtres humains limités puissent se mettre au service de grandes causes sans être eux-mêmes de grands hommes. La science est une technique, sociale et institutionnalisée, où même des gens intelligents peuvent s'avérer inutiles au développement de la connaissance. Un scientifique, dès lors qu'il se laisse voguer dans les méandres de l'histoire en s'appuyant sur la cohorte de ses prédécesseurs, s'intègre à un tel point au sein d'une gigantesque équipe de baskett-ball, d'un immense rassemblement de gens, que ses propres idées peuvent passer inaperçues. Il devient digne de révérence, digne du plus grand respect, par sa [seule] participation à une immense et vénérable entreprise. Ainsi je me mets à appréhender toute éventuelle découverte comme le produit d'une institution sociale, d'une collaboration. Ce que l'un ne découvre pas aujourd'hui, un autre le trouvera un jour ou l'autre. Il me semble ainsi que nos scientifiques, même s'ils ont créé, ne constituent pas le meilleur échantillon pour étudier la théorie de la créativité. »

Mais cela va plus loin et contamine l'ensemble de la société. Les membres de la communauté scientifique ne sont pas les seuls en cause ; toutes les communautés sont concernées par la remarque d'Abraham Maslow, à commencer par celles que nous désignons sous le nom de réseaux, tels qu'ils se manifestent notamment sur le Web.

Plutôt qu'un espace de liberté d'opinion à laquelle il prétend, Internet est en effet trop souvent l'endroit où se rencontrent ceux qui ne recherchent qu'une approbation suffisant à les conforter dans l'idée qu'ils ont raison.

Ils ignorent qu'aucun débat digne de ce nom ne fait obligation à ceux qui y participent d'aboutir à un accord et encore moins à la vérité ou à ce que quiconque ait raison. Plus raisonnablement, il doit viser à enrichir les uns des opinions des autres et réciproquement. Et son utilité est d'autant plus grande que ces opinions divergent, voire s'opposent. Libre à celui qui refuse ce type de confrontation de ne pas s'y livrer. Ou de ne pas la poursuivre quand il s'y est engagé.


De la discussion jaillit la lumière dit l'adage. Il est bon de rappeler à ceux qui confondent lumière et vérité, qu'elle est bien avant cela simple éclairage.

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